Les pélerins d'Emmaüs. 528

Publié le par marike

Relecture des disciples d'Emmaüs avec Marcel Légaut

Le jour de la Résurrection (le 3e jour, selon Luc 24. 21) deux disciples vont à une douzaine de kilomètres de Jérusalem, à un village appelé Emmaüs." (Luc 24. 13-16), "à la campagne"(Marc 16. 12-13). "Jésus lui-même s'approcha et fit route avec eux. Mais leurs yeux étaient privés du pouvoir de le reconnaître".


Voici donc ma démarche pour ce texte : Les disciples (traduire par "pèlerins" ? ce voyage ne va pas vers un lieu sacré, Emmaüs, "pour" ce lieu sacré, et pourtant ce voyage est rempli de spiritualité, de l'esprit de Jésus, le prophète de Dieu qu'ils ont suivi. Les disciples partent de Jérusalem, puis y retournent, immédiatement après "La" Rencontre. On pourrait dire que le pèlerinage est inversé : de Jérusalem ils partent comme part leur foi, vers le néant, peut-être vers leur village natal, de la vie d'avant Jésus, puis reviennent avec la foi, vers Jérusalem et leur communauté de foi.

Les deux disciples sont pleins de l'événement récent de la crucifixion, ils en parlent entre eux : le Messie, c'en est fini à jamais de nos espoirs, de nos illusions ? ("Et ils s'arrêtèrent, tout tristes"(Lc. 24.17 et 21) toutefois ils gardent un coin d'espoir avec le témoignage des femmes (23-24)... Mais peu à peu l'espoir s'installe, de plus en plus fort... Un étranger est venu se joindre à leur marche, puis à leur repas du soir... Quel est ce mystérieux étranger ? ce troisième compagnon ? Le dialogue à trois s'instaure... mais ce dialogue peut être intérieur, nous souffle Légaut... dialogue à deux avec une présence invisible... Comme après une longue maturation de la mémoire, des paroles, des écrits, des actes peuvent s'éclairer... et ce sont ses paroles, à lui, ses créations...Il est là, celui qui les éclaire subitement..

Ces apparitions furent essentiellement individuelles... (M. L. p. 51)

En effet, tel le plongeur qui descend au fond de la piscine et qui remonte, les disciples, qui n'ont plus rien à part Jésus dans leur vie, remontent de leur désespoir pour se réinstaller spirituellement dans la Vie. Ce troisième visiteur leur souffle les réponses attendues. Il est instruit sur la Torah, la Bible juive (25 à 27) : il leur montre les racines de la vie de Jésus dès la Torah, comment son enseignement y est bien fidèle, comment il révèle un retour aux sources véritable, après toutes les déviations, les surcharges humaines que les siècles ont accumulées. Il leur montre tout l'intelligence du parcours, son authenticité, son originalité.

En particulier :
-Ne nous a-t-il pas dégagé deux lois bien perdues (à tort) dans la Torah, et n'en a-t-il pas fait l'axe de sa vie et de son enseignement? (Deutéronome 6. 4-5 et Lévitique 19. 17-18 / Marc 12. 28 à 31, Matthieu 22. 34-40, et Luc 10. 25-28)
-Esaie 11. 1 à 5 ; 42. 1 à 3 ; et tout le chapitre 53.

"Ne fallait-il pas que le Christ souffrît tout cela pour entrer dans sa gloire ?" (26)
Sa souffrance tissant sa vie au service de son Dieu et d'autrui. Compréhension générale d'une vie par le souvenir, à l'oeil de la spiritualité (cf Légaut) 

Mais cette rencontre comprend deux étapes : la première, celle que je viens de signaler, qui est la réappropriation de leur foi, et la seconde... le partage du pain et du vin, qui scelle leur retour à la foi et la reconnaissance certaine (31) de ce troisième compagnon de route.
Elle commence comme la  pèche nocturne quand les orages s'accumulent, par gros temps : le pécheurs ont déjà connu cela, cette inquiétude, avec Jésus dans leur barque, et voilà que monte de leur coeur la prière, le "Reste avec nous ; car le soir approche"...(29)
Alors à nouveau ils vont le retrouver, mais ici par le souvenir tout proche du dernier repas pris avec lui ; ils ne sont que deux, mais le troisième va se trouver dans ce pain et dans ce vin : "Prenez, ceci est mon corps ... ceci est mon sang"...je boirai à nouveau ce fruit de la vigne dans le Royaume de Dieu (Marc 14. 22 à 25).

Cet événement (ces deux événements) nourri par toute une série de souvenirs communs, qui, de disparates, n'ont plus fait qu'un, sont apparus dans leur pleine lumière, sont vécus si fortement par eux deux qu'ils retournent instantanément à Jérusalem pour le partager avec les autres frères... un souvenir fort, comme un lien de plus à Jésus, au Dieu de Jésus.

Peut-être alors que, pour impressionner, persuader davantage leurs auditeurs naïfs, ils ont placé au centre de ce souvenir à la fois unique, intérieur, et commun à eux deux, fort dans sa vérité, une personne, qui leur a parlé...

Dans «  L'intelligence du christianisme »,  son chapitre II, en particulier p. 51, on me signale que Légaut nous  parle de cette rencontre (je ne l'ai pas lu), et p. 51 dans "l'Introduction à l'intelligence du passé et de l'avenir du christianisme", il nous invite à nous remettre dans la démarche des Apôtres, des premiers disciples de Jésus, pour essayer de voir sous les Evangiles la première strate, authentique, de pensée, d'écriture.
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En marge, qui est ce Cléopas ? Qu'en sait-on à l'heure actuelle ? des parentés bien compliquées et délicates face aux croyances actuelles...  http://en.wikipedia.org/wiki/Cleopas
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Livres de Marike (décrits sur la toile, dans ce blog,et recensions) :
- Anthologie de la prose française. 1100-1900. édition indépendante illustrée. 2005. 480 p.
- Etude des Evangiles, suivi de : Les Evangiles et l'écologie  - L'Harmattan, coll. Chrétiens autrement. 2006. 155 p.
- Interroger sa foi. Du calvinisme au judéo-christianisme libéral. Préface du pasteur P. J. Ruff. Edilivre 2013. 261 p.

 

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