145. Matthieu 19. 30 à 20.16. Lecture commentée. Le salaire des vignerons
Article 145. Bible. Evangile selon Saint Matthieu 6. 1 à 8. Lecture suivie et détaillée, verset par verset. Le Sermon sur la Montagne. Justice : réparation. Les premiers et les derniers.
(les trois autres évangiles en complément à la lecture commentée de l'év. de Marc)
Mt. XIX, 30
Beaucoup des premiers seront les derniers et beaucoup des derniers seront les premiers Curieusement, ce verset se trouve à la fin du chapitre XIX et en même temps il sert d'introduction au chapitre XX, 1 à 16 : La parabole des ouvriers vignerons loués à diverses heures.
D'abord remarquons que la Vigne est symbolique : la Vigne du Seigneur, c'est par excellence la culture de l'Esprit. Rabelais dans ses livres nous le rappelle maintes fois ; il me vient à l'esprit l'attaque surprise de la vigne de l'abbaye par ce fou de Picrochole (Gargantua, chapitre XXVII) :
Un moine, frère Jean, vient interrompre le service religieux :
"Alors le prieur du cloître dit : que vient faire cet ivrogne ici ? qu'on me le mène en prison. Troubler ainsi le service divin !
- Mais, dit le moine, le service du vin, faisons tant qu'il ne soit troublé : car vous même, monsieur le prieur, aimez boire du meilleur ; ainsi fait tout homme de bien..."
Mt. XX, 1
"Voilà, en effet, à quoi est semblable le Royaume des Cieux : un maître de maison sortit de très grand matin, afin de louer des ouvriers pour sa vigne. - Mt. XX, 2 - Il convint avec ses ouvriers d'un denier pour la journée et les envoya à la vigne.
Dans les paraboles, le Maître de maison, c'est Dieu. On remarque qu'aujourd'hui le maître ou propriétaire d'une vigne peut faire la même chose ; cette démarche est éternelle ; Jésus intéresse les gens de passage par des exemples concrets pris dans la vie quotidienne : les auditeurs sont concernés ; c'est justement leur cas...voyons la suite...
Mt. XX, 3
En sortant de nouveau vers la troisième heure1 , il en vit d'autres qui restaient sur la place publique sans rien faire.
Note 1 : la troisième heure : 9 heures du matin
Mettez-vous à sa place ! Trois réactions logiques pour un patron : 1) ils me seraient bien utiles 2) ils ont sûrement envie de gagner leur vie, ...3) et j'ai encore largement de quoi les payer ...alors...allons-y !
Mt. XX, 4
Et il leur dit : allez, vous aussi, à ma vigne, et je vous donnerai ce qui est juste. Ils y allèrent. - Mt. XX, 5 - Il sortit aussi vers la sixième heure, puis vers la neuvième, et fit de même.
Voilà un propriétaire qui gère bien ses affaires et qui les suit de près. On remarque qu'ici le salaire est précisé : "un denier pour la journée", à quoi est ajouté : "ce qui est juste")...mais les ouvriers ont tellement envie de gagner leur vie qu'ils ne font surtout pas préciser le maître : ce sera de toutes façons mieux que rester là à s'angoisser et à ne rien faire ! Du côté du patron, comme c'est Dieu...rien d'inquiétant : il tiendra parole ! Ce salaire pour une journée devait d'ailleurs être connu, habituel, mais plutôt généreux, et très répandu.
Mt. XX, 6
Et étant enfin sorti vers la onzième heure, il en trouva encore d'autres qui restaient là, et il leur dit : Pourquoi restez-vous ici toute la journée sans rien faire ? - Mt. XX, 7 - Ils répondirent : parce que personne ne nous a loués ; et il leur dit : Allez vous aussi à la vigne.
La onzième heure ! pour nous cinq heures du soir ! autant dire que la journée de travail est presque terminée !
Et pourtant... le patron continue à embaucher ! il gère décidément de très près son affaire ... mais n'oublions pas que c'est aussi Dieu...Dieu le Père : il vérifie d'abord que ce n'est pas par paresse ou tout autre mauvais motif qu'ils sont restés là à ne rien faire de la journée ; ils ont dû faire le tour des vignes pour être embauchés...mais rien. Toutefois ils espèrent toujours et encore... au cas où il y aurait encore beaucoup de travail à la fin de la journée, et où ce travail presserait....Alors le Père a pitié d'eux : quelle angoisse, pour eux, toute la journée ! Ils sont peut-être plus gringalets que les autres, moins capables ; on les a déjà repérés sur le marché du travail... mais ils ont tout autant besoin de manger que les autres...
Ceci me fait penser à la comédie : l'Avare ; comme le dit Molière par la bouche du cocher, à propos de ses chevaux :
Maître Jacques
Et pour ne faire rien, Monsieur, est-ce qu'il ne faut rien manger ? Il leur vaudrait bien mieux, les pauvres animaux, de travailler beaucoup, de manger de même. Cela me fend le cœur, de les voir ainsi exténués ; car enfin, j'ai une tendresse pour mes chevaux, qu'il me semble que c'est moi-même quand je les vois pâtir ; je m'ôte tous les jours pour eux les choses de la bouche...
Et finalement, dans le secret de son cœur, le Père les préfère alors sans doute à tous les autres, à tel point qu'il est capable d'entamer ses réserves financières auxquelles il s'était peut-être promis de ne pas toucher, afin de les payer comme les autres, au même tarif, à la journée...
Et la fin du récit est prévisible : Dieu fait appeler d'abord les derniers venus travailler pour les payer et il leur donne le même salaire qu'aux autres. Ceux-ci ne trouvent pas cela juste, mais le Maître leur répond qu'il ne les a pas lésés, selon leur accord. Il lui est permis de faire ce qu'il veut de ses biens. Et Jésus de conclure :
Mt. XX, 16
Ainsi les derniers seront les premiers et les premiers seront les derniers.
Ici c'est la pitié, l'amour de Dieu pour ses créatures qui règle les mondes.... Ceux qui souffrent, ceux qui ont souffert, injustement, vont passer devant les autres...dans le cœur de Dieu, dans ses réalisations. "L'Eternel regarde au coeur." ( 1 Samuel 16.7 )
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