416 - A-t-on le droit de blasphémer ?

Publié le par marike

11 12 2011

 

A-T-ON LE DROIT DE BLASPHEMER ?

 

Le sujet est la pièce de théâtre : « Golgota Picnic » qui passe en ce moment au théâtre du Rond-Point à Paris. Cette pièce suscite une révolte catholique.

 

Mais il y en a d’autres, en ces temps de doute et de détachement : « Sur le concept du visage du fils de Dieu » de Romeo Castellucci, A Paris, au Théâtre de la Ville du 20 au 30 octobre 2011, puis au 104 du 2 au 4 novembre 2011.

etc…

 

Voilà un sujet délicat. Deux camps sont en présence : d’un côté les croyants : appelons-les le camp A ; de l’autre les athées matérialistes : le camp B.

 

I – Que dit Montesquieu dans L’Esprit des Lois ?

 

« Il ne faut pas beaucoup de probité pour qu’un gouvernement monarchique ou un gouvernement despotique se maintienne ou se soutienne . La force des lois dans l’un, le bras du prince toujours levé dans l’autre, règlent ou contiennent tout. Mais, dans un Etat populaire, il faut un ressort de plus qui est la VERTU. » (Livre 3, chapitre 3)[1]

 

II - Que dit la Déclaration des Droits de l’Homme ?

 

Article IV :

« La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui. »

Article X :

Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi.

Article XI :

« La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme. »

 

Les deux premiers articles sont en faveur du camp A ; le dernier en faveur du camp B

 

III – Que dit la civilisation grecque ?

 

« L’homme est la mesure de toutes choses. » (Protagoras 480-410) (voir complément note 1)

 

L’hybris, la démesure, est rejetée : Wikipedia dit à ce sujet :

 

« L’hybris (aussi écrit ubris, du grec ancien  húbris) est une notion grecque que l'on peut traduire par démesure. C'est un sentiment violent inspiré par les passions, et plus particulièrement par l'orgueil. Les Grecs lui opposaient la tempérance, et la modération. »

 

IV- Que dit notre civilisation judeo-chrétienne ?

 

« Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Lévitique 19. 18 ; Matthieu 32. 39.

 

V – Que détestent nos temps modernes ?

 

- Le fanatisme et la violence. Un jour cela peut nous pousser à l’exclusion de l’autre et au crime.

- Le mensonge : le « Ne pas mentir » de Soljenitsyne.

 

Ma conclusion :

On est tenté de passer en force quand la communication ne peut être établie. Ici, ce n’est pas le cas.

La vraie laïcité, c’est celle de la tolérance et du respect de l’autre, du partage. C’est celle de notre civilisation judeo-chrétienne. Elle eut un équilibre extraordinaire dans ma jeunesse, quand je participais, comme enfant protestante, aux fêtes catholiques à « la communale » en faisant l’été dans la cour de l’école des fleurs pour la « fête-Dieu », en apprenant, pour le mois de Marie, un cantique sur Marie[2], ou, plus tard, quand les nuages blancs et tourbillonnants des communiantes défilaient à mon plus grand bonheur et ravissement dans ma classe de 6e pour offrir des images à leurs camarades. J’en garde un très bon souvenir et cela ne m’a pas empêché d’avoir mes propres convictions ; c’était simplement une fête de plus. Ouvrir largement les portes à l’autre, sans moquerie.

Toute idée est respectable, mais elle doit se formuler sans excès, sans violence, sans trahir la vérité. Tout excès est mensonge.

L’humour ... savoir se moquer de soi-même  et des autres  avec vérité, avec finesse, mais gentiment. Il existe aussi une caricature violente, agressive, destructrice, excessive donc mensongère. Il faut trouver le ton juste. Enfin, incidemment, je raye ces mots de mon vocabulaire : intégrisme et populisme, quand ils sont employés à des fins publicitaires, pour convaincre indûment, sans un raisonnement en profondeur. L’usage de la force n’a jamais été la clé des cœurs.

 

 



[1] Anthologie de la prose française (1100-1900)  – éd. indépendante. p. 202, ISBN : 2-9520809-0-9 – et, pour les articles suivants de  la Déclaration des Droits de l’homme, pp. 284-285.

Et pp 77-78 : Satires d’Horace : il y a une mesure en toutes choses.

[2] Trois anges sont venus ce soir m’apporter de bien belles choses ; l’un d’eux avait un encensoir…. (« Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? »)

Publié dans Société

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
L
<br /> Je ne parlais pas du régime de Vichy.<br />
Répondre
L
<br /> Au-delà de tes souvenirs émus d'enfance, l'ambiance que tu décris témoigne d'une emprise du catholicisme sur la vie sociale, du type "Catholique et français toujours". Tout comme le clergé<br /> catholique employant à tour de bras le qualificatif "chrétien" pour "catholique" (d'autant plus que, comme l'a écrit il y a 10 ans l'actuel locataire du Vatican, les protestants ne sont pas des<br /> chrétiens à part entière).<br /> <br /> <br /> Mon père, protestant, a passé, dans les années 50, 4 semaines dans un sanatorium catholique en ayant obligation d'assister à la messe (en latin à l'époque) tous les jours, a vu sa tante mariée en<br /> catimini dans une sacristie parce qu'elle n'était point papiste, et  a fini lui-même par se marier au temple en raison des emmerdements divers et variés qu'il dut subir de la part du curé<br /> qui devait l'unir à ma mère au début des années 60. Autant dire qu'il garde un souvenir moins émus de la formidable tolérance qui règnait dans la France catholique d'alors...<br />
Répondre
M
<br /> <br /> Les souvenirs sont divers et variés...mais il faut l'accepter. J'ai bien des souvenirs peu agréables moi aussi dans ma famille au sujet des cathos. Mais rien n'est jamais ni tout noir ni tout<br /> blanc, sinon on tombe dans l'idéologie. Tout ce que tu dis sur le régime de Vichy, je le savais en écrivant ces souvenirs. Ma famille est protestante libérale et gaulliste de la première heure.<br /> Cela n'empêche : les faits, têtus, sont là... comme les tiens. On gagne à partager les fêtes plutôt qu'à se diviser et à ériger des barrières de haine, c'est tout ce que je dis.  <br /> <br /> <br /> <br />