4 - Michel Lefeuvre et ses oeuvres / Michel Lefeuvre and his works

Publié par Michel Lefeuvre

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Michel LEFEUVRE
Philosophe des Sciences

   La première partie de la vie de l’auteur est bretonne (Saint Brieuc, puis Rennes). Licence d’Enseignement en Philosophie à la Sorbonne. Parallèlement il poursuit des études supérieures de théologie catholique.  Docteur d’Etat en  philosophie, une subvention de Paris X lui est accordée -son patron de thèse est Paul Ricoeur- pour faire éditer sa thèse aux éditions Klincksieck  en 1976.
Il enseigne en France dans plusieurs secteurs supérieurs d’Enseignement (Angers) –préparation aux grandes écoles commerciales : ESSEC , H.E.C. (Rennes), Reims, puis la philosophie des sciences à l’Université de Dakar.
  Il prend ensuite sa retraite en France où l’auteur l’emporte alors sur le professeur.

- Merleau -Ponty au-delà de la phénoménologie -

(Thèse de Doctorat d’Etat ayant obtenu une subvention pour sa publication -chez Klincksieck  - 1976-  par l’intermédiaire de Paul RICOEUR, patron de la thèse)

L’homme est un être qui parle. C’est sur le langage que porte en définitive « Merleau-Ponty au-delà de la Phénoménologie ». Le langage n’est pas simplement le revêtement de la pensée ; il est lié au corps. Celui-ci n’est pas qu’une entité anatomique, objectivable par la science ; du point de vue de la phénoménologie, il est une entité sensible, qui sent en lui la diversité du monde qui l’entoure, ses couleurs, ses lumières, ses formes, ses mouvements, ses reliefs, distances et profondeurs qui le rapprochent ou l’éloignent de lui. C’est ce monde muet que le langage prend en charge en en faisant un monde parlant. Toutefois ce n’est pas simplement le corps silencieux que le langage prend en charge, c’est aussi la réalité à laquelle il donne accès. Il le fait de multiples manières, aussi bien par la peinture  -le langage pictural, encore un peu muet- que par un traité de philosophie dont les non-dits, les intervalles entre les idées, sont souvent plus importants que des concepts exprimés par des mots. Que signifie donc ce passage du monde muet au monde parlant , articulé ? La réponse est la suivante  :  un nouveau type de liaison entre les êtres qui parlent ; la nature n’est plus seule en cause ; la culture s’y est surajoutée, comme au règne de la nécessité biologique celui de l’intelligence et de la liberté. Descartes l’avait bien entrevu : le langage est la frontière qui délimite l’humanité de l’animalité.

            Pourquoi le sous-titre : au-delà de la phénoménologie ?  Quand un corps perçoit des couleurs, des formes, des objets en mouvement, des distances, c’est bien un sujet qui perçoit ; de même c’est un sujet qui parle. Dans la perception muette comme dans la parole sonore et audible, le sujet joue un rôle important ; mais il ne s’agit que d’un aspect du phénomène ; cet « au-delà », c’est l’ontologie, l’être qui se donne à voir, à être entendu, à être compris. L’interrogation ultime paraît donc la suivante : Qu’est-ce qui lie le sujet à l’être pour qu’il y ait perception muette des choses ou langage articulé en concepts de ces mêmes choses ? Le lien ne serait-il pas dans la présence cachée, inconceptualisable, d’un Opérateur suprême agissant dans le temps et dans l’espace, et produisant en eux des êtres vivants de plus en plus à sa ressemblance ? L’homme étant le terme de cette action.

(Ce livre, épuisé, disponible chez l’auteur )   ISBN : 2-252-01878-X

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« Nature et  Cerveau »  -Klincksieck 1991 -

     Si quinze ans séparent ces deux ouvrages, une continuité existe entre eux. La Nature est pour moi le cosmos en devenir, produisant, à terme, de la vie, du conscient et de la pensée, celle-ci pouvant être considérée comme sa raison secrète. Je suis à cette époque extrêmement frappé par le principe anthropique. L’homme est apparu sur terre à un certain moment déterminé du cosmos, en liaison avec des constantes cosmologiques, la force gravitationnelle, la masse du proton, la force électromagnétique.

            Avant la pensée, le sensible s’est déjà introduit dans l’univers comme son double inspiré, capable de se revivre dans la chair. La finalité a mauvaise presse dans des mentalités imprégnées du darwinisme et du néo-darwinisme. Kant lui a donné, en outre, un statut idéaliste qui ne peut que heurter l’esprit scientifique. Ce n’est que plus tard, et surtout dans mon ouvrage en préparation  sur la « réhabilitation du temps » que je lui donne un statut réaliste inspiré par les systèmes cybernétiques qui se finalisent eux-mêmes. A l’époque de « Nature et cerveau », je m’attache surtout à montrer que l’émergence du conscient, qu’il s’agisse de la conscience sensible ou réfléchie, pose comme condition l’apparition dans le vivant d’un système nerveux. D’où le titre : « Nature et cerveau ».

ISBN : 2-252-02747-9

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« Les Echelons de l’être. De la molécule à l’esprit. » -L’Harmattan 1997-

            Ce livre peut être lu comme une exploration des différentes étapes qui, au cours de l’évolution, ont conduit à l’Homme. Des mouvements variables de l’amibe à la recherche de nourriture dans le milieu environnant, à la coordination dans le cerveau humain de ses multiples bouches d’associations, un immense intervalle a été franchi. La vie rudimentaire, celle d’une bactérie, fait déjà référence à une certaine subjectivité, ce qui n’est pas le cas d’un caillou ou d’un quelconque cristal. Mais la subjectivité ne devient conscience qu’après de nombreuses différenciations cellulaires. Une étape importante s’est produite avec le passage des micro-organismes unicellulaires aux organismes multicellulaires, puis des animaux didermiques aux animaux tridermiques. Le système nerveux est facteur de progrès ; plus il se complique, plus la marge d’indétermination qu’il engendre  est grande pour l’animal qui en est doté. L’indétermination se fait liberté chez l’homme grâce aux multiples connexions neuronales qui peuvent s’y produire. Qui dit liberté dit au minimum distanciation par rapport au milieu et par rapport au patrimoine biologique. C’est ainsi que, grâce » à l’homéothermie et à l’émergence de nouveaux systèmes neuronaux (ex : le P.G.O. ou système ponto-genouillé-occipital), des manifestations psychiques telles que le rêve et le jeu s’introduisent dans le comportement des animaux supérieurs (oiseaux et surtout mammifères).  C’est grâce aussi à de nouvelles extensions cérébrales et à la spécialisation des hémisphères cérébraux chez l’homme que le langage et la syntaxe grammaticale peuvent se superposer au schéma corporel.

ISBN : 2-7384-5177-2 – voir le site de l’auteur au site de L’Harmattan.
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« Une critique de la raison matérialiste. L’origine du vivant. »
 -L’Harmattan 2003-

            Les auteurs de ce livre sont Michel Troublé, docteur en physique, chercheur en intelligence artificielle et en robotique et moi-même.

 

            Tout être vivant doit faire face à la complexité du réel pour s’y adapter. Le roboticien doit également construire des machines capables de s’adapter, d’apprendre, de reconnaître, voire d’évoluer. La robotique ne détient-elle pas la clé des mécanismes du vivant ?La réponse est non. En effet le vivant construit par ses propres moyens la niche écologique dans la complexité du réel qui l’ ‘entoure. Il n’en va pas de même pour les robots, pour les animaux artificiels de compagnie : ils exécutent un certain nombre de mouvements dans les domaines d’êtres planifiés à l’avance par leurs concepteurs. Leurs mouvements peuvent échapper à la prévision de ces derniers, mais c’est toujours à l’intérieur d’un cadre préalablement agencé  par eux. On ne peut parler véritablement de spontanéité à leur sujet ; il leur manque la sensibilité de l’animal qui structure la réalité extérieure en fonction des déterminants bio et neurobiologiques de son espèce -l’araignée qui tisse sa toile, la fourmi qui creuse des galeries.  Notre thèse va à l’encontre du connexionnisme :  de la matière, si ingénieusement connectés que soient ses éléments composants, ne peut naître la vie ou la pensée. Ces dernières naissent dans la matière mais non pas d’elle. Un opérateur transcendant à la matière s’impose comme une exigence de la raison.

Consulter sur http://www.philothema.com

ISBN : 2-7475-4796-5

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« La réhabilitation du temps. Bergson et les sciences aujourd’hui. »
L’Harmattan – 2005 - 

            Il ne s’agit pas de nier les avancées de la science depuis l’époque de Bergson. Il convient de leur donner le statut philosophique  qu’elles méritent. Trop souvent les scientifiques pensent dans l’espace alors qu’il faudrait penser dans le temps. Prigogine l’a compris pour les sciences de la matière -les systèmes complexes-. Par contre, pour les sciences de la vie, du cerveau et de la connaissance (le cognitivisme) peu de scientifiques ont opéré cette mutation. Leur sujet d’étude l’exige pourtant. La durée bergsonienne colle davantage à la réalité biologique  que le hasard et la pression de sélection  pour rendre compte de l’évolution. Les théories, déjà anciennes, de J. Monod et de F. Jacob, ainsi que d’autres plus récentes, comme celles de J.J. Kupiec et de P. Sonigo sont examinées de même que la philosophie qui les sous-tend -le nominalisme revendiqué par ces deux derniers. Une incursion en dehors des paradigmes  de l’époque est pratiquée avec l’examen des œuvres de R. Chandebois : « Le gène et la forme » et « Pour en finir avec le darwinisme ». Une nouvelle logique du vivant ».

            Un chapitre important est réservé  aux neurosciences (J.P. Changeux, A. Berthoz, A. Damasio, Gérald M. Edelman). Un exemple fera comprendre ce que j’entends par la réhabilitation du temps. Les neurophysiologistes pensent généralement  qu’un souvenir est conservé  quelque part ( ?) dans le cerveau. Comment une telle matérialisation pourrait-elle donner au souvenir le sens  qu’il s’agit d’un événement  de notre passé ? A l’espace, ou du moins en liaison avec lui, je me suis efforcé de substituer , conformément à la philosophie  bergsonienne, la notion de durée, de rétention dans le présent  tourné vers l’avenir, de la polyphonie du passé .

            C’est à partir  de là que je repense les interactions du corps  et de l’esprit.

ISBN : 2-7475-9388-6 – 15,50 € -
Voir le site de l’auteur sur le site de L’Harmattan.

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Scientifiquement incorrect

ou les dérives idéologiques de la science

-Salvator – 2006 - 

Notre époque est en plein bouillonnement d’idées. Les esprits s’invectivent. Certains craignent un retour du religieux dans les sciences  avec la notion de l’Intelligent Design telle qu’elle se développe aux Etats-Unis. Ils prônent un retour à « l’esprit des Lumières » comme il s’est manifesté au XVIIIe siècle en Europe,  rejetant  toute autorité autre que celle de la raison. D’autres défendent une science  sans a priori. C’est  dans ce contexte de pensée que se situe cet ouvrage  « Scientifiquement incorrect ».

     Pour l’auteur de ce livre, la science dont l’objet est l’étude  des causes naturelles doit être scrupuleusement respectée ; l’un de ses titres de noblesse est de ne s’enfermer dans aucun dogmatisme ; elle doit accepter tout nouveau chemin de connaissance, dût-il remettre en cause celui sur lequel elle  se fondait antérieurement, s’il est préférable. Le rôle du philosophe ne se limite pas à un rôle de surveillance ; en tant qu’épistémologue il est aussi un théoricien de la connaissance et c’est là que Michel Lefeuvre démontre  que la biologie  et les neurosciences actuelles arrivent à des conclusions matérialistes faussées  qui n’ont rien de scientifique mais qui sont des a priori  métaphysiques parce qu’elles sont fondées  sur un certain type de philosophie, l’empirisme de Hume  et des ses épigones, bien dépassé aujourd’hui par des travaux sur le fondement de la connaissance. Mais si la science doit bien  se limiter à son domaine propre, elle n’est pas, surtout dans l’état avancé actuel de ses connaissances, sans poser d’énormes questions à la philosophie.

Et si le matérialisme était tout simplement une déviance épistémologique ?

                                                                                  (Texte extrait  de la 4è de couverture)

Renseignements :                                                                                                      

180 pages. -  Format :  14 x 21 - Parution en librairie : mai 2006 -
ISBN 2-7067-0428-4   -  Code-Barre  - Prix TTC : 19,90 euros TTC

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Le Cerveau et la putain
Quand la science oublie la finalité

(Salvator/Yves Briend - 2010 -  ISBN : 978-2-7067-0725-4 - )

Ce livre se propose de redonner à la finalité la place qu’elle mérite. Pour son auteur l’Evolution possède une signification. Même si la part de la contingence y est grande, l’Evolution n’a pas fait que bricoler ; ses conquêtes successives ont été orientées, d’une façon générale, dans le sens de structures toujours plus complexes et plus finement agencées. En raison de l’instabilité de l’A. D. N. des mutations se sont greffées sur ce plan général pour le diversifier, à l’exemple, chez les batraciens, des grenouilles et des salamandres. Ainsi le bricolage dont parlent les neodarwiniens ne se situe pas au niveau de la Grande Evolution mais à celui des aménagements secondaires.

            Pourquoi donc la finalité a-t-elle si mauvaise réputation ?  Le concept de finalité a été élaboré dans les temps modernes par Kant, à une époque où les sciences de la vie étaient encore peu développées par rapport aux sciences de la matière inerte  -la mécanique newtonienne. Les types de jugements les concernant ne devaient pas être les mêmes à son avis.  A ceux relatifs à la vie il donne un fondement idéaliste. Les biologistes contemporains ne semblent pas avoir pris encore la mesure de la révolution apportée par la cybernétique : grâce à elle on peut donner à la finalité un statut tout à fait réaliste.

            C’est d’ailleurs dans cette perspective que Michel Lefeuvre aborde la question du cerveau humain : celui-ci est-il l’organe de la pensée ou un organe d’adaptation aux conditions extérieures auxquelles la vie doit faire face ?  Pour lui, pas de doute : la finalité du cerveau est extrêmement pratique. En contrepartie on ne saurait réduire la pensée spéculative à un assemblage de neurones ; portée à ses sommets c’est plutôt une lutte contre le conformisme du cerveau qu’elle engage, démontrant ainsi la réalité de l’esprit. Einstein disait de la science qu’elle devait être sauvagement agressive à l’égard de la nature –la philosophie du non, de Bachelard. Le livre présente aussi une vue sur les grands courants de pensée du vingtième siècle. Il aborde également par la philosophie la question de l’art.

Ce livre se propose de redonner à la finalité la place qu’elle mérite. Pour son auteur l’Evolution possède une signification. Même si la part de la contingence y est grande, l’Evolution n’a pas fait que bricoler ; ses conquêtes successives ont été orientées, d’une façon générale, dans le sens de structures toujours plus complexes et plus finement agencées. En raison de l’instabilité de l’A. D. N. des mutations se sont greffées sur ce plan général pour le diversifier, à l’exemple, chez les batraciens, des grenouilles et des salamandres. Ainsi le bricolage dont parlent les neodarwiniens ne se situe pas au niveau de la Grande Evolution mais à celui des aménagements secondaires.

            Pourquoi donc la finalité a-t-elle si mauvaise réputation ?  Le concept de finalité a été élaboré dans les temps modernes par Kant, à une époque où les sciences de la vie étaient encore peu développées par rapport aux sciences de la matière inerte  -la mécanique newtonienne. Les types de jugements les concernant ne devaient pas être les mêmes à son avis.  A ceux relatifs à la vie il donne un fondement idéaliste. Les biologistes contemporains ne semblent pas avoir pris encore la mesure de la révolution apportée par la cybernétique : grâce à elle on peut donner à la finalité un statut tout à fait réaliste.

            C’est d’ailleurs dans cette perspective que Michel Lefeuvre aborde la question du cerveau humain : celui-ci est-il l’organe de la pensée ou un organe d’adaptation aux conditions extérieures auxquelles la vie doit faire face ?  Pour lui, pas de doute : la finalité du cerveau est extrêmement pratique. En contrepartie on ne saurait réduire la pensée spéculative à un assemblage de neurones ; portée à ses sommets c’est plutôt une lutte contre le conformisme du cerveau qu’elle engage, démontrant ainsi la réalité de l’esprit. Einstein disait de la science qu’elle devait être sauvagement agressive à l’égard de la nature –la philosophie du non, de Bachelard. Le livre présente aussi une vue sur les grands courants de pensée du vingtième siècle. Il aborde également par la philosophie la question de l’art.

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Science et Philosphie. Panorama 1945-2012

(Salvator /Yves Briend.  2013) 

Présentation du livre par l'auteur : Mon livre est un livre militant : il affirme que la vie n'est pas réductible à la matière, à la molécule, y compris sous la forme de la génétique mendélienne[1]. Le gène comme molécule ne saurait exprimait l'essence de la vie, la nature du vivant.

Il affirme aussi que l'esprit n'est pas davantage réductible aux neurones.

Il s'agit toutefois d'un militantisme au second degré car il épouse étroitement, et je dirais même avec une certaine connivence et sympathie, les thèses de Jacob et de Monod sur le programme génétique et de J.P. Changeux sur L'Homme neuronal.

Distinguer la vie de la matière, l'esprit du neuronal ne signifie pas pour autant les séparer, d'une manière qui ferait penser à Descartes, comme s'il s'agissait de substances, d'entités séparées reliées artificiellement entre elles. Dans le plus simple du vivant – une paramécie, par exemple –la matière et la vie ne font qu'un. Je voudrais insister sur ce qui fait leur unité : à mon sens il s'agit du mouvement. Vita in motu, comme le disaient les Anciens. Une chose matérielle, un caillou, ou tout autre objet, ne se meut pas par lui-même ; par contre une simple bactérie s'agite énormément.

En affirmant que la vie est dans le mouvement, même infiniment lent, je pense que je ne rencontrerai pas beaucoup de contradicteurs. Définir ce qu'est le mouvement est un exercice autrement périlleux, surtout établir les liens qui existent entre les mouvements qui se produisent dans le cerveau pendant que quelqu'un perçoit, imagine, se souvient, pense, agit volontairement, et les actes mentaux eux-mêmes, à savoir percevoir, imaginer, penser, agir volontairement.

Pour répondre à la question un premier préalable s'impose : quelle est la nature du mouvement ? Quelles zones du cerveau concernent-ils, selon les fonctions considérées ? En effet la perception ne concerne pas les mêmes zones que l'action volontaire. D'une façon plus générale, quelles sont ses caractéristiques ? Pendant très longtemps,  on a pensé que  les mouvements se produisaient "en ligne" dans le cerveau. Prenons un exemple : si j'épelle des mots à haute voix, il s'agit d'un exercice de langage ; mais avant de l'épeler je dois le reconnaître visuellement. Voici un exercice en ligne : le système visuel est d'abord concerné, puis, dans la même foulée, le langage, l'articulation des mots.

Or, pour compliquer les choses, on sait aujourd'hui qu'en plus des "systèmes en ligne" il y a beaucoup d'autres "systèmes en parallèle" dans le fonctionnement cérébral, comme percevoir un objet là où il se situe dans l'espace, dans son environnement, et quelle est la nature de cet objet – une fourchette , un vase relèvent de deux systèmes différents agissant en "parallèle" –  Il faut savoir en outre qu'un mouvement cérébral revient sur lui-même, se ré-introduit dans des mouvements d'ensemble plus complexes, d'un niveau hiérarchique supérieur. C'est ce que l'on nomme à partir d'Edelman un processus de ré-entrée.

Avant de m'interroger sur le fait de savoir si toute la vie mentale est réductible à ce qui se produit dans le cerveau en fait de mouvements, je voudrais insister sur l'ambiguïté des faits mentaux qui allient étroitement entre eux l'objectivité et la subjectivité. Percevoir une chose, c'est bien, sauf accident cérébral, la percevoir objectivement,  telle qu'elle est dans sa nature même et là où elle se trouve ; mais cette chose, c'est bien moi, subjectivement, qui la perçoit, en tant que conscience individuelle. Objectivité et subjectivité sont donc étroitement liées.

            Portons-nous maintenant à l'autre bout de la vie mentale : la réflexion ; elle est bien une activité personnelle ; c'est bien Einstein qui réfléchit sur la Relativité, et Planck sur les Quanta. Cependant c'est à la plus grande objectivité qu'ils visent l'un et l'autre.

            Comment sortir de cette impasse ? J'ai objectivement besoin du cerveau pour voir, réfléchir, décider – c'est lui qui semble faire le travail – mais cependant ce n'est pas lui qui voit, qui réfléchit, qui décide, c'est moi en tant qu'entité subjective, conscience individuelle.

            Il y aurait peut-être u moyen de sortir de cette difficulté en se plaçant dans la dimension temporelle. Les travaux de B. Libet peuvent y aider.

            Dans une décision qui engage sa volonté, telle que se lever de sa chaise pour aller rechercher un livre dans la bibliothèque, que se passe-t-il ? Comment les choses se déroulent-elles ?  On pourrait penser que c'est la conscience qui arrive en premier : ma conscience formerait le projet dans un tout premier temps.  Or en fait, dans les calculs très précis de Libet, la conscience ne survient que  345 millisecondes après la décision elle-même. Avant que la conscience ne se produise, quelque chose a donc eu lieu au niveau neuronal. La conscience ne serait-elle donc qu'un simple épiphénomène ?

            La réponse n'est pas aussi simple. Il arrive que la conscience puisse être agie.  J'ai donné dans "Panorama" l'exemple suivant : lorsque je reconnais un mai dans une foule compacte, c'est souvent à partir, et grâce à un simple détail vestimentaire. Les neurobiologistes savent bien aujourd'hui que l'hippocampe possède une structure auto-associative;  c'est elle qui explique qu'un simple détail se lie à d'autres scènes semblables ou similaires perçues antérieurement. Comme l'expliquait déjà très bien Bergson,  dans Matière et Mémoire : le cerveau est essentiellement un instrument d'action. Il y a une reconnaissance dans l'instantané dont le cerveau à lui seul est capable. Si je reprends l'exemple précédent : mon sentiment de reconnaissance a sa racine  dans l'organisation auto-associative, auto-explicative de mon hippocampe.

            La vie psychologique est loin pourtant de se limiter à de tels exemples. A partir de la réflexion où je suis arrivé je propose maintenant de l'orienter vers certaines grandes lignes de l'Evolution. Vita in motus : c'est le mouvement qui distingue le vivant de l'inerte. Ma thèse est la suivante :  la conscience naît dans le cerveau mais n'est pas produite, causée par lui. Je vais un peu m'attarder chez l'être humain au niveau du toucher dont la main est l'organe matériel, puis au niveau de la vision dont l'organe sensoriel est l'oeil ; je parviendrai enfin au langage.

            C'est donc grâce au mouvement que la vie a donc pu prendre naissance dans les grosses molécules encore inertes de la matière ; c'est également grâce au mouvement que les plus simples organismes peuvent continuer à vivre. Par le mouvement une méduse entre en contact, grâce à ses pseudopodes, avec le milieu environnant, pour y trouver sa nourriture, se jeter sur une proie ou s'écarter d'un danger. Ce simple contact  va aboutir, après une longue évolution, à l'invention de la main chez l'homme. Un immense progrès a eu lieu. Ce progrès est même sensible par rapport à la patte de l'animal, et même à la main du chimpanzé et autres grands singes. Tout ce progrès s'est-il fait sans ordre, par pur hasard ? On voit parfois dans certaines magazines plus ou moins populaires des générations de singes dont le profil va progressivement en se redressant jusqu'à atteindre la station debout, verticale.  L'intention darwinienne est évidente, mais, si l'on compare la main de l'homme avec la disposition toute particulière du pouce par rapport aux autres doigts de la main, l'explication par petites touches s'ajoutant les unes aux autres n'est plus scientifiquement acceptable ; il y a eu, en fait, mutation, changement d'espèce et progrès.

            Avant d'orienter notre réflexion vers l'invention de l'oeil, il convient de rester encore quelque temps à considérer le rôle de la main. C'est grâce à son anatomie que l'homme, à la différence des grands singes, a pu devenir un homo faber ; sans elle nous n'aurions ni l'aurignacien, ni le magdaleinien, ni, beaucoup plus tard, les toutes premières créations de l'agriculture et de l'industrie. Ne serait-il pas possible – ô horreur ! – d'entrevoir un commencement  de finalité dans l'anatomie et la physiologie de la main humaine ?

            Celle-ci est encore à envisager sous un autre aspect : je veux parler de sa structure profonde. Dans chaque acte de toucher il y a à la fois du touchant et du touché. La philosophie se pose des questions qui ne sont pas du ressort de la science, comme, par exemple, celle-ci : pourquoi y a-t-il toucher, ou vision, plutôt que rien ? Les structures profondes du toucher et de la vision vont pouvoir nous mettre sur la voie d'une réponse. J'ai déjà dit plusieurs fois que c'était par le mouvement que la vie s'introduisait dans la matière ; ainsi, à un autre niveau d'expérience, pour reconnaître la matière d'une étoffe, sa qualité, nous la palpons : il ne suffit pas de poser la main sur elle ; c'est grâce à un mouvement qu'elle livre l'essentiel de  son secret. De plus, quand je palpe une étoffe soyeuse, ce que je ressens se trouve-t-il dans ma main ou dans l'étoffe touchée ? La décohérence – au sens figuré que je lui donne : ici un clivage entre le touchant et le touché – que le mouvement de la main introduit dans la matérialité compacte de l'étoffe n'est qu'une ébauche. Nous allons voir bientôt combien elle est plus achevée dans la vision, et encore davantage avec le langage. Abordons alors la question métaphysique, qui s'exprime ainsi : s'il y a bien clivage,  cela ne peut se produire tout seul : il y a bien une raison, une cause qui se tient cachée en arrière-plan ; quelle est la nature de cette cause ? c'est ce que nous allons essayer de traquer. Mais auparavant il convient de porter notre attention vers l'invention de l'oeil. 

            Darwin lui-même avouait que l'étude de la formation de l'oeil lui avait causé bien des sueurs froides à cause de ses "admirables dispositifs". Par quelles infimes transitions s'ajoutant sans ordre les unes à la suite des autres l'Evolution aurait-elle pu être conduite, de l'existence de simples cellules  sensibles  à la lumière,  ou encore de modèles d'yeux pivotant, comme en ont les crustacés, jusqu'à l'oeil dont nous disposons, capable de voir de loin, y compris la nuit, jusqu'aux étoiles les plus lointaines ? Cela tiendrait véritablement du miracle, et encore bien plus en ce qui concerne l'invention du langage.

            Si la vision ne concerne qu'un seul organe, l'oeil, le langage concerne d'abord l'élocution avec tout ce que cela suppose d'ajustements et de remaniements très précis. Le larynx doit être en position rigoureusement ajustée par rapport aux capacités thoraciques, à la position et à l'anatomie  de la bouche, des lèvres et du palais. Pourtant ce n'est pas encore suffisant ; si l'on parle, c'est évidemment pour être entendu et compris.  Les organes de l'audition doivent être également pris en compte, comme ceux de la voix. Locution et audition sont mises en relation par l'échange verbal entre interlocuteurs. Il s'agit évidemment d'un medium beaucoup plus immatériel qu'un quelconque contact physique  comme en ont parfois les animaux pour communiquer entre eux ; un processus de dématérialisation s'est produit dont la pensée tire un avantage considérable. Que serait une pensée dépourvue de la réflexivité que lui procure le langage articulé ?

            Il y a quelque chose de bien trop oublié aujourd'hui : je veux parler des transcendantaux. Ils n'auraient pas vu le jour sans cette montée de l'Evolution vers l'invention du langage, bien qu'ils n'y soient pas réductibles. Que de temps, d'effort, de patience les philosophes et les savants dont s'honore l'humanité n'ont-ils pas dépensé à rechercher les lois physiques, chimiques, biologiques de la nature ! Disons à propos du transcendantal Vrai qu'il naît dans le cerveau mais qu'il n'est pas causé par lui. S'il l'était, il y aurait quelque intérêt matériel à rechercher le vrai ; or quel intérêt biologique Galilée avait-il à affirmer l'héliocentrisme à l'encontre du géocentrisme, à s'attirer par là les foudres redoutables de l'Inquisition ? Pour la recherche du vrai, il faut évidemment disposer d'un cerveau suffisamment développé ; le néo-cortex a véritablement explosé avec l'avènement de l'homme. Faut-il voir un lien de stricte causalité entre le néo-cortex et la recherche désintéressée des lois de la nature ? Le cerveau est un animal fougueux, pense Alain Berthoz ; il a besoin d'être inhibé. Le développement du néo-cortex joue précisément une action de ce genre ; ce n'est donc pas à une activité causale sur l'esprit humain que nous avons affaire avec le développement foudroyant du néo-cortex ; sa complexité croissante a au contraire pour fonction essentielle de le libérer des  dictats  des automatismes.  La recherche du vrai comme transcendantal n'a donc rien à voir en tant que telle avec une quelconque action neuronale.

 

[1] La Génétique mendélienne est la partie de la génétique dont la transmission des caractères, d'une génération à la suivante, chez les êtres sexués, animaux ou végétaux, suit les lois de Gregor Mendel. Il existe en effet des caractères ou des gènes transmis qui ne suivent pas ces lois, par exemple les ADN mitochondriaux.

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D’une vie à l’autre » par Evelyn Elsaesser-Valarino

(Bertelsmann en allemand 1995) –(Plenum Press – en anglais –  New York et Londres -1997) – (Dervy – en français – 1999- (350 pages) -

            Ce livre est la réunion de neuf  dialogues avec l’auteur de l’ouvrage de scientifiques et de spécialistes (médecine, psychologie, biologie, biophysique, physique et chimie, electro-mécanique, neurophysiologie, théologie, philosophie. Michel Lefeuvre a rédigé pour sa partie le neuvième et  dernier chapitre.

ISBN : 2-84454-010-4
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La Matière et l'Esprit
Variations sur un thème 

L'Harmattan  (ouverture philosophique). mai 2016.
300 p.
ISBN : 978-2-343-081155-7

Ce livre couvre le champ de la vision  de l'univers, et ses interrogations. Il clôt une vie de travail au point de rencontre de la philosophie et de la science.

 

Derniers articles : dans la revue "Teilhard Aujourd'hui" :
N° 29 - mars 2009 - "La vie et l'Evolution"

N° 34 - juin 2010 - "A la recherche de la nature humaine" (vie. naissance. néotonie.)
N° 36 - déc. 2010 -   "Pour en finir avec le darwinisme. Une nouvelle logique du vivant"(recension d'une nouvelle édition à l'Harmattan.1993/nov. 2010)
N° 39 & 40 - sept. et déc.2011 - Le néo darwinisme en question.
N° 48 - déc. 2013 -  A propos de la finalité. 

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Réflexions diverses :

Information :
Le livre du Professeur Rosine Chandebois :

L’EMBRYON CET INCONNU (2004)
avec un avant-propos de Michel Lefeuvre

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Il est d’un intérêt de tout premier plan pour l’embryologie aujourd’hui, et laisse loin derrière lui  les « dogmes » officiels.

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Pour donner quelque crédit à ses thèses, voici quelques citations reproduites ici, à propos de son œuvre en général :

Je dois dire  que l’ouvrage  est de si grande valeur que sa diffusion ne devrait pas se limiter à la France

(Prof. P.D. Nieukoop, Directeur de l’Institut international d’embryologie d’Utrecht, Traité de 76)

I believe that its influence will be considerable

(Prof. D.A. Glasgow - Monographie 83)

L’ouvrage de Rosine Chandebois rappelle aux biologistes de la jeune génération nombre de données classiques oubliées ou ignorées trop souvent. Il faut espérer que cette leçon que nous donne R. Chandebois sera entendue.

(Prof. R. Thom, de l’Académie des Sciences. le Gène et la Forme.) 

A propos des données provenant de toutes les disciplines  des sciences de la vie :

C’est le grand mérite  du livre du Prof. Chandebois que de les assembler et de les enrichir grandement avec la compétence que lui confère une fructueuse carrière de chercheur.

(Prof. M Schützenberger, de l’Académie des Sciences. Pour en finir avec le darwinisme.)

Et dans un encart publicitaire de Médecine et Sciences de sept. 1990 :

Le large champ de ses analyses donne les clés pour comprendre la biologie de demain.        (Prof. J. Roux)

 un livre essentiel et les travaux que nous conduisons sur le cancer trouvent parfaitement leur place -du point de vue théorique- aux côtés de votre vision du gène et de la forme.

(Prof. J.P. Escande)

             Le bouquin est diablement bon. ( Prof. R. Chauvin)

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Pour le commander : Prix : 16 euros franco de port (avec le catalogue gratuit (?)

à l’adresse suivante : Les éditions de l’Age d’Homme - 5, rue Férou - 75006 Paris -

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Articles :

Etude sur la linguistique  -Impact 1969 – Angers

Musique et peinture – Etudes – mai 1974 –

Arts muets et langage – Annales de l’Université de Dakar – 1978-79

Tradition et rupture dans les arts – Essai sur les arts en Afrique – Annales de l’Université de Dakar – 1978-79

Le Monde et la Nature – Revue Sénégalaise de Philosophie janvier-juin 1982

Le monde, le corps  et l’esprit – Revue Sénégalaise de Philosophie – juillet-décembre 1982

Vie privée et vie publique – Revue Sénégalaise de Philosophie – janvier-décembre 1985

Une nouvelle primauté du réel - Revue des Sciences religieuses - n°2. avril 2007.

p. 175 à 198.

Réflexion sur le vivant, le cerveau et l'esprit - Teilhard aujourd'hui. n° 29. mars 2009

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Mes liens :

 

Rosine Chandebois

 le site partiel:                     http://rmgc.free.fr

 

  Michel Troublé

Adresse électronique:      tromi@wanadoo.fr 

Le site:                               http://www.philothema.com

 

Les éditions de l'Harmattan

Le site et le contact:        http://www.editions-harmattan.fr     

 

Les éditions Klincksieck

Le site:                                http://www.klincksieck.com

Adresse électronique:        courrier@klincksieck.com

 

Les Editions L'Age d'Homme

Adresse électronique :           info@agedhomme.com

Le site:                                      http://www.agedhomme.com

 Les éditions Salvator /Yves Briend

Adresse électronique :

Du site :  http://www.editions-salvator.com/fra/index.php

Editions SALVATOR - Yves Briend Editeur S.A
103, rue Notre-Dame des champs - F - 75006 PARIS -
Téléphone : + 33 (0) 1 53 10 38 38 - Télécopie : + 33 (0) 1 53 10 38 39

salvator.editions@wanadoo.fr

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4-Site de Michel Lefeuvre. Channel of Michel Lefeuvre

Michel LEFEUVRE 

Philosophe des Sciences Philosopher of Science

    La première partie de la vie de l'auteur est bretonne (Saint Brieuc, puis Rennes). Licence d'Enseignement en Philosophie à la Sorbonne.
The first part of the life of the author is Brittany (St. Brieuc and Rennes). Teaching License in Philosophy at the Sorbonne.

 Parallèlement il poursuit des études supérieures de théologie catholique.  Docteur d'Etat en  philosophie, une subvention de Paris X lui est accordée -son patron de thèse est Paul Ricoeur- pour faire éditer sa thèse aux éditions Klincksieck  en 1976.
At the same period, he pursued graduate studies in Catholic theology. Doctor of Philosophy - his thesis supervisor is Paul Ricoeur-, a grant of Paris-X is awarded to him so that his thesis is published by  Editions Klincksieck in 1976 

Il enseigne en France dans plusieurs secteurs supérieurs d'Enseignement (Angers) –préparation aux grandes écoles commerciales : ESSEC , HEC (Rennes), Reims, puis la philosophie des sciences à l'Université de Dakar.
He teaches in France in several sectors of higher education (Angers), preparation for large business schools ESSEC, HEC (Rennes), Reims, and the philosophy of science at the University of Dakar.

Il prend ensuite sa retraite en France où l'auteur l'emporte alors sur le professeur.
He then retired to France, where the author takes precedence over the Professor.

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