53. Marc. 6, 45 à 52. Lecture commentée. Jésus marche sur la mer

Publié le par marike


Article 53. Evangile selon Saint Marc.  6, 45-52. Jésus marche sur la mer. Lecture suivie verset par verset, puis de ses compléments dans les autres évangiles.  Correspondances de l’extrait :  Mt. XIV, 22 à 36 ; Jn. VI, 16 à 21

VI, 45
Aussitôt après  il pressa ses disciples de remonter dans la barque, de prendre les devants et de se rendre sur la rive opposée, à Bethsaïda, tandis que lui, il renverrait la foule. - VI, 46 - Quand il l'eut congédiée, il s'en alla sur la montagne pour y prier. - VI, 47 - Le soir vint, la barque était au large ; à terre,  Jésus, demeuré seul.


(La carte des villes du Lac  : http://www.messagers-de-lalliance.fr/cartes.html
et Bible Segond d'étude 2002, pp. 1242, 1295) : les villes les plus au Nord : Capharnaüm, et un peu plus à l'Est Bethsaïda ; puis si on longe la côte Ouest vers le Sud, on a  : Génésareth ?, Magdala, Tibériade, cette ville-ci au milieu du Lac ; plus bas à l'Ouest dans les terres Nazareth et le Mont Tabor.)

Nous avons ici un petit film précis d’événements .
On voit ici pour la deuxième fois, inséré dans cette action intense, le besoin de solitude de Jésus pour se recueillir et pour prier. Un lieu propice, désert, un moment propice, sont  choisis. Jésus est environné de silence, de nature, de crépuscule puis de nuit. Il est proche de Dieu.


VI, 48
Le vent était contraire aux disciples : ils se fatiguaient à ramer ; Jésus le perçoit, va vers eux, vers la quatrième veille de la nuit1, en marchant sur la mer, et il voulait les dépasser. 

     Remarquons qu'auparavant Jésus se sépare de ses disciples alors qu'il fait encore jour. Ceux-ci ont pêché (sans doute) toute la nuit et ils doivent être fatigués à l'aube. Ils n'en peuvent plus. Jésus sent peut-être le vent d'où il est et il imagine la fatigue de ses disciples. Il peut agir aussi par transmission de pensée. C'est alors que survient le miracle : là encore, plusieurs interprétations sont possibles : 1) un véritable miracle ; 2) une communion, un rassemblement  en esprit : Les disciples, à jeun, fatigués,   vont en esprit vers Jésus pour qu'il les soulage ; ils imaginent Jésus venir vers eux ; ils en ont même la vision, un peu comme un mirage, et cette vision les soulage ; Jésus, de loin, a pitié d'eux : il va, en esprit, vers eux. 3) une invention pure et simple, un récit épique, peut s'être greffé là-dessus pour gonfler les faits, pour faire impression sur un auditoire naïf, pour emporter son adhésion. 
     La dernière partie du verset nous interroge : Jésus, en "voulant dépasser" les disciples, n'est-il pas seulement une apparition, une vision rassurante qui passe, et qui les dépasse,  comme un nuage qui longerait l'espace de leur bateau et s'en irait plus loin, dans leur imaginaire comme sur la mer ? cette vision collective rappelle en tous les cas aux disciples croyants sa présence, et que rien de mauvais ne peut leur arriver, tant qu'ils sont avec lui. Est-il vraiment présent en chair et en os ?
     En réalité, quel peut être le plus grand rêve, plus ou moins inconscient,  de pécheurs sans cesse aux prises avec les éléments contraires ? Eh bien c'est de marcher sur la mer comme sur la terre ferme, de ne plus avoir sous soi cet élément angoissant, de pouvoir fuir la tempête et la mort. C'est pour des pêcheurs la projection la plus pure de leur espérance, de leur foi ; Jésus pour ses disciples vainc véritablement la mort  et les y appelle : chez Matthieu, Pierre s'y essaye. Ce récit est donc d'abord, ou aussi, symbolique : quittons nos peurs ; ayons foi, et nous vaincrons.

note 1 : la nuit, de 6h du soir à 6h du matin, était divisée en quatre parties, de 3 h. chacune, appelées veillées. Donc la 4e veille commence à 4h du matin. Peut-être retrouve-t-on cette expression dans le langage des marins "être de quart". ?

VI, 49
Quand ils le virent marcher sur la mer, ils crurent que c'était un fantôme et jetèrent des cris.
- VI, 50 - Tous en effet le voyaient et étaient bouleversés.  Mais aussitôt il leur parla ; il leur dit : "Rassurez-vous ; c'est moi ; soyez sans crainte. " - 51 - Il monta avec eux dans la barque et le vent cessa.

     Là encore plusieurs interprétations possibles : un miracle, ou une hallucination collective ; enfin un récit épique, fictif, d'édification, à partir d'une base véridique légère. Nous avons vu un scenario proche dans l'article 40 : "Jésus calme une tempête en mer" ; dans les deux cas, selon M. E. Boismard, Jésus Roi soumet les puissances cosmiques à l'homme ; on peut mettre en parallèle le récit, très proche par plusieurs de ses éléments,  de l'apparition du Christ ressuscité (Lc. XXIV, 36 à 43 ; Jn. XX, 19-20). 

VI, 52
Leur stupeur allait grandissant : ils n'avaient même pas compris ce qui s'était passé à propos des pains, tant leur cœur était aveuglé.

Jésus souligne parfois la distance qui le sépare de ses disciples. "Ils n'y ont rien vu" comme on dit.

En réalité, face à ces hommes des époques anciennes, en contact constant avec la Nature, alors que nous le sommes de plus en plus avec les murs des villes bétonnées, l'auto, le train, l'avion et  l'ordinateur, la radio et la TV, la pollution, nous avons certainement perdu collectivement une partie du sens de "l'Au-delà"

Résonance : un mot / un poème : Nuit   Le Porche du mystère de la deuxième vertu 

O Nuit, ô ma fille la Nuit, la plus religieuse de mes filles
La plus pieuse.

O ma fille aux yeux noirs, la seule de mes filles qui sois, qui puisses te dire ma complice.
Qui sois complice avec moi, car toi et moi, moi par toi
Ensemble nous faisons tomber l’homme  dans le piège de mes bras
Et nous le prenons un peu par une surprise.
Mais on le prend comme on peut. Si quelqu’un le sait, c’est moi.

Au puits de la Samaritaine, toi qui puise du puits le plus profond
La prière la plus profonde.
O nuit, ô ma fille la Nuit, toi qui sais te taire, ô ma fille au beau manteau.
Toi qui verses le repos et l’oubli. Toi qui verses le baume, et le silence, et l’ombre
O ma Nuit étoilée, je t’ai créée la première.
Toi qui endors, toi qui ensevelis déjà dans une Ombre éternelle
Toutes mes créatures
Les plus inquiètes, le cheval fougueux, la fourmi laborieuse,
Et l’homme, ce monstre d’inquiétude.
Comme tu endors l’eau du puits.

Toi qui répands de tes mains, toi qui verses sur terre
Une première paix
     Avant-coureur de la paix éternelle.
Un premier repos
     Avant-coureur du repos éternel.
Un premier baume, si frais, une première béatitude
     Avant-coureur de la béatitude éternelle.
Toi qui apaises, toi qui embaumes, toi qui consoles.
Toi qui bandes les blessures et les cœurs meurtris.

O ma fille étincelante et sombre, je te salue

                                                                        Charles Péguy
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Ed. indépendante illustrée. 2005. 480 p. Prix : 26 €. Epuisée. Qui la rééditera ?
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L'Harmattan, coll. Chrétiens autrement. 2006. 155 p. Prix : 14,50 €
- Interroger sa foi. Du calvinisme au judéo-christianisme libéral. Préface du pasteur P. J. Ruff. Editeur : Edilivre. 2013. 261 p. Prix : 20€
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Réf. illustration : Avignon - BM - ms. 0138 - f. 247 - Jésus marchant sur les eaux - Missel romain - vers 1370 - http://www.enluminures.culture.fr/documentation/enlumine/fr/LISTES/sujet_00.htm

Publié dans Christianisme.

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