207 - Lettre à Dieu
Au Paradis
Un peu partout
Au Jardin d'Eden et ailleurs
Le Ciel
L'Infini
Cher Dieu,
Avant toutes choses, je voudrais que tu saches que je ne te confonds pas avec le Père Noël, vulgaire déformation légendaire du Nicolas que tu connais bien, (tu sais, Santa Claus ? ils ont ajouté « saint », mais bon, ce sont les hommes, que veux-tu ! ils en font toujours plus que toi ! )
Je ne vais pas te redire ce que des myriades d'humains sur la terre te demandent tous les jours ; cela commence à te bassiner les oreilles car tu n'y peux rien, apparemment ; évidemment je ne sais pas pourquoi, mais le fait est là. De plus, ça recommence toujours de plus belle, et plus on avance dans le temps, plus ça a l'air d'empirer, avec leur soi-disant religion, leur soi-disant science et leur soi-disant technique, leur chimie, leur mondialisation...Sarkozy a beau se démener...que veux-tu ...
On se demande d'ailleurs de plus en plus par ici si en réalité ce ne sont pas les hommes qui doivent t'aider à construire tout ça peu à peu ; en effet regarde ton serviteur Teilhard, bien sûr comme d'habitude condamné par le pape : il dit que c'est à la fin des temps qu'il faut aller te trouver... Il a dû être lui aussi découragé en regardant le temps présent. Evidemment tu n'avoueras jamais ton impuissance, et c'est cela qui fait peut-être ta force, mais on ne sait jamais, à force de coups de mains du côté des hommes... ils finiront bien par faire quelque chose, car ils réparent, réparent, réparent sans cesse les dégâts qu'ils font eux-mêmes, et, à force de réparer...qui sait ? Peut-être comprendront-ils un jour qu'ils dressent une immense échelle de lumière qui va toujours dans la même direction ? Moi je trouve que cette échelle de lumière est merveilleuse, extrêmement belle, même si... je sais qu'un jour le soleil cessera de briller et que l'Apocalypse viendra sur notre bonne vieille terre...mais ils disent que tu es au bout du bout du bout du chemin...et je ne demande qu'à les croire...
Je voudrais quand même te présenter une requête : J'aimerais que tu apparaisses aux darwiniens, que tu ne cesses de leur envoyer des visions de toi-même, afin qu'ils soient bien embêtés (tu vois, même un chrétien, ça n'est jamais parfaitement bon). D'ailleurs, beaucoup, dans le secret de leur cœur, ont des doutes, te reconnaissent, mais c'est leur vanité, leur carrière, leur peur d'être marginalisés, qui les empêche de l'avouer, et on les comprend un peu : que ferait-on à leur place... je ne suis pas si sûre de moi !
Ne sois pas jaloux aujourd'hui de Darwin ; ils lui ont dressé un trône supérieur au tien, mais tu sais bien que tu as l'arme la plus forte face à lui : le Temps. C'est Bergson qui l'a trouvé (d'ailleurs tu sais qu'il est très mal vu à cause de ça), et, après lui, mon mari, évidemment. Regarde avec tes yeux de derrière : combien d'idoles sont déjà tombées dans la nuit du temps et de l'oubli ! Car si tu as inscris la mémoire, la durée, dans le tissu du temps, tu as aussi, heureusement, créé l'oubli.
Quelqu'un a dit quelque part que tu savais rire ; peut-être me pardonneras-tu alors cette lettre.
Je ne veux pas t'importuner davantage. Veuille transmettre le témoignage de mon admiration sans partage à ton fils Jésus. Infiniment respectueusement et cordialement,
Marike