653. Différence entre sunnites et chiites

Publié le par marike

1. Entre chiites et sunnites un schisme en 632

Tant que le prophète Mahomet est en vie, l’islam ne forme qu’un seul et même courant. En 632, à sa mort, des divergences de vue apparaissent.
            Les chiites et les sunnites ne lui reconnaissent
pas le même successeur. Ceux qui choisissent Ali, gendre du prophète, deviendront les chiites, tandis que ceux, majoritaires, qui préfèrent suivre Abou Bakr, compagnon de Mahomet, deviendront les sunnites, tout en proclamant, vraisemblablement faussement, que le compagnon de Mahomet est de sa descendence (fitna : discorde entre musulmans)

2. Une organisation du clergé très différente
            Les chiites reconnaissent 12 imams, réputés infaillibles dans l’interprétation du Coran. Parmi ces 12 imams se trouvent les deux fils d’Ali. Les chiites croient que le douzième imam reviendra à la fin des temps pour juger les hommes.
sunnites :                                                                        chiites
1)caractère divin du Coran                                              1)caractère non divin du Coran
2)histoire prédéterminée (fatalité)                                    2)liberté individuelle
3)1 seule autorité politico-religieuse (ècalifat)
(au Maroc le roi est commandeur des croyants)       3)1 clergé très hiérarchisé, (les                                                                                                             ayatollahs en Iran),
                                                                                           distinct du pouvoir politique.
                                                                                        4) la raison, pilier de la foi.

Au-delà du Coran, les sunnites sont également fidèles à la « sunna », les faits et gestes de Mahomet. À travers la sunna, les sunnites tentent d’imiter le Prophète.

3. Les sunnites ultra-majoritaires
            Les sunnites constituent le courant majoritaire
, et même très largement majoritaire, de l’islam. Dans le monde, les musulmans se divisent entre environ 85% de sunnites contre 15% de chiites.
            Les chiites sont toutefois majoritaires en Iran, en Irak (de peu) et au Bahreïn.
            Au Liban, les chiites sont aussi devenus récemment la communauté majoritaire (ils sont maintenant plus nombreux que les chrétiens et les musulmans sunnites).
            Avec environ 20% de chiites, le Pakistan compte aussi un grand nombre de disciples d’Ali.

4. Les kharidjites, les alaouites, les druzes : de petites branches dissidentes
           
Le kharidjisme est une secte qui s’est constituée en 660. Comme le chiisme, elle est apparue au moment des querelles de succession après la mort de Mahomet. Les kharidjites ont reproché à Ali de s’en remettre à une décision humaine et non divine pour décider qui allait diriger la communauté. C’est d’ailleurs un kharidjite qui a assassiné Ali.
Cette tradition est présente chez les Berbères du Maghreb.
            Les alaouites sont une branche dissidente du chiisme, alaouite signifiant « partisan d’Ali ». Ils considèrent ce dernier comme l’incarnation de Dieu sur terre. Beaucoup moins rigoristes que les kharidjites, ils prient chez eux et boivent de l’alcool. Très peu nombreux, ils sont au pouvoir en Syrie, à travers le clan el-Assad.
            Les alaouites partagent avec une autre communauté, celle des druzes, l’habitude de garder leurs rites secrets. Répartis entre le Liban, le Nord d’Israël et la Syrie, les 500 000 druzes pratiquent une religion non prosélyte : si l’on ne nait pas dans une famille druze, on ne peut devenir druze. Formant une branche « hérétique » du chiisme, à forte dimension ésotérique, les druzes croient que Dieu se manifeste périodiquement sous une forme humaine.

5. Historique
Au début du 16e s. le clergé chiite est sorti de son quiétisme, légitimant la dynastie politique  des Séfévides en Iran. Alliance des Séfévides et des oulémas. Le chiisme devient religion d’Etat.
A la fin du 18e siècle, l’interprétation des textes sacrés (l’Ijtihad) par la raison devient obligatoire, véritable défi aux sunnites, limités aux 4 rites officiels. L’Arabie saoudite est d’un sunnisme radical :  wahhabite (1924). Ce dernier (bédouins) s’est construit, créé, contre le pouvoir ottoman, les villes, les soufies, et, en Irak, contre le pouvoir chiite (en Irak, la famille régnante était souvent sunnite, alors que la tribu était chiite). Au cours du XIXe siècle, les réformistes reprennent sans le dire les idées wahhabites (religion de bédouins ignares, selon l’opinion), en 1 retour aux origines pour lutter contre les puissances occidentales (contrôle de l’Arabie en 1920, où les 2 courants : réformiste et wahhabisme, se rejoignent).
            2 courants sont nés de là : le salafisme, tradition  apolitique et quiétiste, où la seule souveraineté appartient à Dieu, d’une part, et d’autre part l’islamisme, dont Les Frères musulmans en Egypte, qui fait dépendre le pouvoir des élections. Echec des élections au Printemps Arabe, sauf l’AKP d’Erdogan en Turquie, mais celui-ci considéré comme renégat par l’EI (ceci est lié à des enjeux politiques concrets).
            En 1920, après la chute de l’Empire Ottoman, les sunnites pactisent (Irak, Liban) avec l’Occident pour garder le pouvoir, tandis que les chiites s’affirment contre le colonialisme européen.
            En 1979, la Révolution islamique en Iran accompagne l’émancipation politique chiite de la domination sunnite, au Liban, dans le Golfe, en Irak, d’où le Hezbollah libanais.
            La guerre Iran/Irak (1980-1988)    prolonge la volonté d’émancipation chiite entre baasistes et chiites en Irak. Un front sunnite (avec l’aide militaire de Sadam Hussein contre les pays arabes du Golfe) contre l’Iran et contre les chiites irakiens.
            L’invasion américaine en 2003 privilégie les chiites et met à jour les communautarismes, ainsi que Les printemps arabes de 2011. L’Iran et l’Arabie saoudite se combattent par procuration en syrie et au Yémen.
            Le chiisme duodécimal (= 12. Croyance en l’existence des 12 imans) d’Iran, pilier mondial du ralliement du chiisme.
« Cette nouvelle fitna ait se confronter tous les Etats arabes (Irak ; Syrie, Turquie, Iran, Arabie saoudite) ». « La principale victoire de l’EI en Irak a été de réussir à convaincre sunnites et chiites qu’ils ne pouvaient plus vivre ensemble ».
Les Européens  prennent conscience de la fragilité des alliés sunnites  traditionnels ; s’appuyer sur les Etats en place ?
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La production du pétrole dans le monde explique parfois les conflits :
13% Arabie Saoudite. Russie
10% EU
5% Chine 
4% Canada .Iran. Irak.Koweit - 3% Vénézuéla. Nigéria – 2% Angola
13% Le reste du monde
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Avec la guerre en Irak, puis en Syrie, et la création de l’EI, les conflits naissent et s’exaspèrent entre sunnites et chiites dans différents pays d’Orient.

1) les sunnites autour de l’Arabie saoudite sunnite wahhabite,
- Barheïn : confiscation du pouvoir par la dynastie sunnite régnante Al-Khalifa. Système clientéliste depuis 2 siècles. 70% de la population est chiite (560 000 personnes).
- Pakistan : (Islamabad). Les chiites représentent entre 15 et20% des 190 millions de Pakistanais. Les chiites ont un niveau d’éducation plus élevé, ce qui explique leur forte représentation aux leviers de commande, et les jalousies . Lej (création en 1990) : groupe sunniste radical islamiste agressif contre les chiites alliés de l’Iran. De même les Talibans sunnites (TTP).  Influence croissante de la Chine dans la pacification du Pakistan. Refus des Pakistanais d’aller se battre avec L’Arabie saoudite contre le Yemen chiite (« partenaire non servile »).

2) Les chiites autour de l’Iran chiite duodécimain
- au Liban (30% chiites et 30% sunnites)  le Hezbollah chiite (d’abord contre Israël et les chrétiens) tout puissant derrière le Syrien Bachar El Assad, contre « le courant du futur », principale formation sunnite.
- En Irak, la chute de Mossoul a renforcé les sunnites. L’atroce compromission sunnite avec l’EI. L’administration américaine a intensifié les réflexes communautaires.
- En Syrie (70% de sunnites, 10% d’alaouites, secte chiite), les alaouites, proche du pouvoir Bachar El Assad, qui cimente une coalition des minorités (chrétiens, kurdes, druzes). Les alaouites souvent persécutés se sont réfugiés sur la montagne le long de la côte, de Lattaquié à  Tripoli. En 1980, alliance avec l’Iran dans sa guerre contre Sadam Hussein. En 2008 traité de défense commune avec l’Iran contre les EU et Israël.
- En Turquie, 2e religion, l’alévisme (courant chiite de 25 à 30 millions de turcs, pour l’Ataturk, courant plus évolué : égalité complète H/F, Humanisme) n’est toujours pas reconnu en Turquie, et brimé
- Au Yémen chiite (la rébellion chiite houthiste : fondateur Al-Houthi) contre l’Arabie saoudite sunnite.
- En Afghanistan, la 3e communauté ethnique : les Hazaras, d’origine mongole, chiites, pro EU, qui sont allés combattre pour Bachar El Assad en Syrie, face aux sunnites Tadjiks et Pachtouns,  à la menace talibane  (vers l’E. I. ?)
- Au Nigéria, l’armée sunnite, salafiste, alliée de l’Arabie saoudite, de Boko Haram, met un coup d’arrêt brutal à la puissance chiite (Mouvement Islamique du Nigéria : IMN, qui a des relations détestables avec les autres confréries soufies, tidianes, salafistes…).

Sources et auteurs pour l’article :
1) http://www.caminteresse.fr/economie-societe/chiites-sunnites-alaouites-druzes-faites-vous-la-difference-118514/  article de Béatrice Roman-Amat,
2) additions du « Monde » des 15,16 et 17 mai 2016 –auteur de l’article : Pierre-Jean Luisard :  « La globalisation du conflit sunnites-chiites semble irréversible » : Propos recueillis par Christophe Ayad et Cécile Hennion.
3) cahier du « Monde » des mêmes dates dans le dossier spécial : « Un conflit aux mille visages » (8 pages) par différents spécialistes du Proche Orient. 
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Publié dans Religions.

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