203 - Bienfaits et méfaits du protectionnisme

Publié le par marike.over-blog.com

 

A la suite d'un article du « Monde » du 07 02 2009 p. 16 :
un entretien avec l'économiste Daniel Cohen : « Le  protectionnisme aggraverait la crise ».

 

I  - Bienfaits du protectionnisme ou méfaits de la mondialisation

 

Idées extraites du site : « Debout la République en Seine Maritime (76) » (article du 6 août 2007)

 

-Jean-Luc Gréau :

Vous êtes un des rares économistes à remettre en cause les effets du libre-échange. Pourquoi ce débat semble aujourd'hui tabou ?


Deux raisons expliquent qu'aujourd'hui la contestation du libre-échangisme est devenue une question interdite. Il y a d'abord de la part des hommes politiques une vraie peur de se faire taxer d'extrémisme. Car, aujourd'hui, le Front National et une partie de l'extrême gauche sont les seuls partis qui se déclarent ouvertement opposés à ce système. Ensuite, il y a une pression constante du monde des affaires, et plus encore du secteur financier, à présenter ce débat comme éculé, synonyme d'un archaïsme économique.


Il est difficile de contester que la croissance mondiale est tirée par des puissances comme la Chine et l'Inde, qui se sont intégrées dans le commerce mondial grâce au libre-échange.


Le fait que le déficit commercial de l'Union européenne avec la Chine ait augmenté de 93 % depuis le début de cette année est bien le signe que quelque chose ne va pas. Aujourd'hui, l'Union européenne exporte 100 vers la Chine et importe 300 de produits made in China. Aux Etats-Unis, ce rapport est de 1à 6. Dans nos relations avec la Chine, nous ne profitons pas des supposés bénéfices du libre-échange. C'est pour cela que le retour d'un nouveau protectionnisme est inéluctable. Le vrai risque c'est d'attendre trop longtemps que les emplois industriels en Europe aient totalement disparu.

 

Mais vous risquez de stopper net le développement de ces nouvelles puissances et donc de faire plonger la croissance mondiale.


Non. D'où provient la croissance mondiale aujourd'hui ? Un peu des Etats-Unis, mais surtout de l'Asie et dans une moindre mesure de l'Amérique latine. En Chine et en Inde, elle a été alimentée grâce notamment à l'élargissement du processus capitaliste, qui permet à ces pays d'élever leur niveau de compétence et de savoir-faire. Dans ce contexte, les multinationales, en investissement localement, jouent un rôle déterminant dans ce processus de développement. Il ne s'agit pas de remettre cela en question. Le problème c'est que ces nouveaux pays ont choisi un mode de développement qui privilégie la croissance de leurs exportations au détriment de l'énorme potentiel de leur demande intérieure et donc d'un certain progrès social. Je considère que la Chine mène une politique économique impérialiste, dont ni l'Europe, ni les Etats-Unis, ni même l'Afrique ne bénéficient. Trois décisions majeures des autorités chinoises viennent d'illustrer cette ambition. D'abord, la création d'une société à capitaux publics pour être capable demain de construire un avion de ligne chinois concurrent de Boeing et d'Airbus. Ensuite la volonté d'utiliser une partie des immenses réserves de change de la Chine pour investir sur les marchés financiers occidentaux. Enfin la hausse de 30 % des droits de douane à l'importation de certains biens d'équipement pour protéger son industrie nationale. Et pendant ce temps, l'Europe reste inerte.

Concrètement, quelles mesures protectionnistes préconisez-vous ?


D'abord, il ne s'agit surtout pas d'envisager un protectionnisme à l'échelle nationale, mais au niveau de l'Union européenne (un marché intérieur de 450 millions de consommateurs). Or l'UE n'est pas cette union douanière qu'elle devrait être : aujourd'hui le total des droits de douanes ne représente que 2 % de la valeur totale des échanges. C'est trop peu. Il ne s'agit pas non plus de décider d'un tarif commun unique, quels que soient les produits et les pays. Cela n'aurait aucun sens de vouloir par exemple taxer les produits américains. Il faut retrouver les conditions d'une certaine loyauté commerciale. Il s'agit donc de cibler les produits manufacturés en provenance de pays où le différentiel de coûts de production est trop important. Ces barrières douanières seraient par ailleurs une vraie incitation pour améliorer les conditions sociales et salariales des populations ouvrières de ces pays.

Mais à moyen terme, les coûts chinois vont augmenter et les conditions d'échange devraient donc se rééquilibrer.

Je ne le crois pas. Les écarts salariaux sont trop importants et la Chine comme l'Inde disposent d'une immense armée de réserve de main-d'œuvre qui leur permet de maintenir une pression constante sur les salaires. D'ici à ce que cet écart soit comblé, disons peut-être dans vingt-cinq ans, l'Union Européenne sera devenue un désert industriel.

Dans l'histoire, quand des pays ont décidé de mesures protectionnistes, cela s'est presque toujours soldé par des crises, voire des guerres.


On a souvent accusé le protectionnisme de la crise des années 30. En réalité, la crise était là avant que les mesures protectionnistes ne soient mises en place. Quant au risque nationaliste, cela n'a pas de sens si ce genre de politique est mené à l'échelle de l'Union européenne, un immense marché de 300 millions d'habitants. En revanche, si on ne fait rien, les tentations nationalistes risquent de nous couper définitivement du reste du monde.

 

Et ailleurs sur la toile

- Quelques stratégies protectionnistes : 1) les Etats-Unis : les règles du Gatt ne sont pas totalement appliquées, c'est le cas de "l'American Selling Price".
2) le Japon : le commerce extérieur nippon est administré. De ce fait, les importations sont limitées.
3) la CEE : existence d'un tarif douanier extérieur commun.

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Les pays tels la Chine et l'Inde attirent les investisseurs par une main d'oeuvre moins onéreuse (et corvéable), sans protection sociale.


- En Allemagne, selon une enquête du 01 02 2009, du cabinet  Ernst & Young,  78 % des patrons de PME souhaitaient des mesures protectionnistes.

 

- Avec la crise, dans plusieurs pays on avance timidement des mesures protectionnistes sectorielles.

 

-Depuis les années 1930, les EU pratiquent une politique globalement protectionniste -voir le site wikipedia- par leur législation sur les marchés et des subventions.

 

-Le protectionnisme libéral de Friedrich List est lui aussi envisageable : le financement des projets de recherche ou la mise en place de branches considérées comme naissantes et donc fragiles pourrait être étudiés. Les secteurs clés (énergie, sécurité, agriculture, écologie) ne peuvent pas être considérés comme de simples secteurs vendables au plus offrant....Le Libre-échange ne peut se faire qu'entre pays de puissance économique comparable. Un pays, ayant une fois rattrapé le niveau des autres, pourra passer à un système de libre-échange qui reste l'objectif de long terme.

 

 

- On ne peut relocaliser une entreprise qui a été délocalisée : cela créerait des ennuis avec le pays hébergeur pour lequel tout n'est que bénéfices, et cela serait cher, sans compter d'autres complications, du fait qu'une entreprise peut être multinationale. Mais il faut prendre maintenant la bonne décision dès le départ. Si une entreprise fait des bénéfices, elle n'a aucune raison de se délocaliser. Une entreprise devrait chercher par tous les moyens à rester dans le pays de sa création, avant de songer à se délocaliser. Pour cela une organisation européenne devrait se mettre en place et des règles européennes devraient être édictées, afin que le but ne soit pas de gagner « toujours plus », en faisant fi des protections sociales et de salaires décents pour les employés dans d'autres pays, mais que le but soit avant tout l'homme, le travailleur. On peut objecter à cela que si l'on gagne plus tout en respectant pleinement son employé, on peut réinvestir dans son entreprise et  la faire progresser, au bénéfice de tous. Mais l'on sait que, en délocalisant, c'est uniquement en ne respectant pas le travailleur que l'on peut gagner plus. Il n'y a pas de miracle.

 

 

II - Bienfaits de la mondialisation et méfaits du protectionnisme

 

- La PAC (Politique agricole commune) a longtemps consisté en versement de subventions agricoles. Cette politique a favorisé l'agriculture intensive, ce qui a eu des conséquences dommageables sur le plan du dévelopement durable.


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Le protectionnisme est réciproque (normalement, les mesures de rétorsion de l'autre pays sont à égalité)


- Le coût des unions douanières européennes est principalement payé par les pays extérieurs à l'Europe.


- Relancer notre consommation européenne, selon la demande du FMI ( Fonds monétaire international ), c'est relancer les importations, mais il ne faut le faire que si tous les pays la relancent en même temps (réciprocité).


-Toutefois il faut organiser le commerce mondial, et faire des exceptions pour les pays défavorisés.


- Pour une industrie naissante, la protection doit être temporaire et l'ouverture à la concurrence doit être réalisée au moment opportun c'est-à-dire quand la firme devient compétitive (quand le prix des biens qu'elle fourni sont supérieurs a ses couts de production =bénéfices). Ceci constitue un des arguments libéraux au niveau national

 

Ma conclusion 

 

L'idéal serait sans doute un mélange des deux : libre échange et protectionnisme, mais bien étudié selon les multiples paramètres à prendre en compte, avec un accord de tous les pays... mais l'idéal n'est-il pas toujours utopique ? Il faudrait donc y tendre au maximum, et ne pas attendre que les années passent en voyant se détériorer les choses...


Voir aussi mes deux articles 200 et 201 sur la décroissance ... 

 

 

 

 

 

 

 

 

Publié dans Société

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