302 – Lecture judeo-chrétienne, unitarienne, de « L’Institution... » de J. Calvin. III, 20 la prière (suite) Le Notre Père

Publié le par marike.over-blog.com

23 09 2009


302 – « L’Institution de la religion chrétienne » de J. Calvin. III, 20 la prière (suite) Le Notre Père

 


Un petit retour en arrière…Si je me sens totalement libre pour critiquer Calvin, -car il ne faudrait pas en faire un « pape » protestant en acceptant par principe tout ce qu’il dit, et surtout une protestante unitarienne !- je ne voudrais pas être ingrate non plus : A peu près tout ce que j’ai retenu de lui ici -en bleu- est intéressant, souvent riche, et, avec un peu de recul, surtout les chapitres sur la justification par la  foi seule.
     En effet, à mon sens, il montre la question par tous ses aspects et il y en a bien toujours un qui échappe. Il m’a convaincu : il souligne  l’immense distance entre ce que nous appelons Dieu, notre Dieu judeo chrétien, et tous les autres hommes, tous pécheurs, sans grande différence de niveau à cet égard, face à la très grande grandeur de Dieu.


Il montre alors, après la foi,  l’importance de la reconnaissance de nos manquements : 1) en nous-mêmes par l’introspection qui est selon moi un début de prière, suivi de la demande de pardon
2) vers l’extérieur, par la confession, pour obtenir le pardon de Dieu (la grâce).
    

Un Dieu jaloux ne peut souffrir l’orgueil des hommes, face à lui, mais il est aussi un Dieu Père, plein d’amour pour ses créatures.
    

 J’ajoute que, malgré leurs tares, il ne se résout jamais à les abandonner complètement ; il revient toujours vers elles, de lui-même, après les avoir punies ; en fait, comme père, il semblerait ne pas pouvoir se passer de nous ! Il doit être tout ébaubi d’avoir créé une telle merveille et tout marri d’avoir donné la vie à un tel monstre ! (un peu comme beaucoup de pères, peut-être !)


34. Le Notre Père : un modèle pour la prière chrétienne…

…donné par Jésus.

 

(Pour le « Notre Père » voir aussi mon article 133)


(Mt. 6. 9 ; Luc 11. 2)


Note : Calvin n’a cessé de retoucher «  L’Oraison dominicale », déjà présente dans l’édition de 1636. le commentaire de Calvin a fortement influencé la tradition réformée.


Platon…déclare que la meilleure manière de prier  est celle d’un poète ancien : demander à Dieu de nous faire du bien, que nous le demandions ou que nous ne le demandions pas, et de détourner de nous le mal, même si nous désirerions qu’il nous arrive. (Platon  : Alcibiade  II, 142 e, 143 a)

 

En effet, il est parfois dangereux de demander à Dieu ce que notre désir nous suggère ; et (Romains 8. 26-27)


35. Le Notre Père est divisé en 6 requêtes, formant deux parties


(« Délivre-nous du mal » -qui ne se trouve pas dans Luc 11. 4- fait partie de la requête : « ne nous conduis pas en  [abandonne pas à la ]  tentation »)


Les trois premières requêtes concernent la gloire de Dieu… les trois autres contiennent nos demandes.


Si le nom de Dieu est sanctifié, comme nous le demandons, cela contribue aussi à notre sanctification.

 

Calvin veut dire ensuite que toutes nos demandes doivent faire passer avant tout la gloire de Dieu

 

Moïse et Paul ne se sont pas désolidarisés de leur peuple, à l’encontre de leur intérêt, et pour la gloire de Dieu : (L’Eternel ferait -il grâce au peuple en partie à cause de ceux qu’il aime ? )

 

Moïse dit à l’Eternel :  Hélas ce peuple a commis un grand péché : ils se sont fait un dieu d’or. Pardonne cependant leur péché ; sinon efface-moi du livre que tu as écrit. L’Eternel répondit à Moïse : Celui qui a péché contre moi, je l’effacerai de mon livre…(Exode 32. 32)

 

Et Paul : J’ai une grande tristesse et un continuel tourment dans le cœur. Car je souhaiterais d’être moi-même anathème, séparé de Christ, pour mes frères…les Israélites… (Romains 9. 3)


36. Ce que comporte l’invocation « Notre Père »


Toutes nos prières doivent être présentées à Dieu au nom de Jésus-Christ, car aucune ne peut lui être agréable par un autre nom.

 

Cette phrase m’interroge : en effet, comme Jésus a renouvelé l’image juive de Dieu, surtout dans le cas de l’amour et du pardon, et que tout chrétien est en accord avec ce renouvellement de la vision, il est souhaitable que nous présentions nos prières au nom de Jésus-Christ, ne serait-ce que par reconnaissance.

Toutefois, je n’aime pas le ton autoritaire et exclusif de Calvin (« doivent »). Jésus veut avant tout que l’homme soit libre dans ses décisions. L’affirmation qui suit et qui commence par « car » est à mes yeux fausse : En effet, Jésus n’est pour moi qu’un homme, et je peux fort bien m’adresser au Père directement. La gloire de ce dernier n’en sera pas amoindrie ; au contraire !  Je ferai ainsi comme David et tous les juifs pieux de l’Ancien Testament, surtout quand il s’agira de lui présenter mes louanges. Je ne mets pas la suite, contraire à mes idées unitariennes (la grâce uniquement  par Jésus-Christ, et l’idée de fils d’adoption.)


Dieu le Père a donné à tous ceux qui croient en son Fils unique ce privilège et ce cadeau parfaits d’être faits enfants de Dieu. (Jean 1. 12)

 

Voilà le texte Segond , replacé dans le contexte :


10. La Parole était dans le monde, et le monde a été fait par elle ; mais le monde ne l’a pas connue.
11. Elle est venue chez les siens, et les siens ne l’ont point reçue.
12. Mais à tous ceux qui l’ont accueillie  elle a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à tous ceux qui croient en son nom…
13. …qui sont nés de Dieu.

 

Comparons les traductions : Calvin ajoute : « Dieu le Père a donné », remplace « la Parole » par « son Fils unique », remplace « le pouvoir » par « ce privilège et ce cadeau parfaits », « devenir » par « faits ».

 

Une unitarienne prend les paroles de Jean comme on prend une vision, aux contours flous, et symboliques.

 

Pour moi, aux versets 10 et 11, La Parole, c’est ce qui traduit le mot « Esprit », fait chair, c’est à dire écriture, langage, parole.

 

A ce moment-là, ce mot prend une large ampleur poétique, des résonances nouvelles. Il va directement à son essence. Les hommes sont sourds à l’appel du bien, du beau, du vrai, de l’un.

 

« le pouvoir » : en effet, ce n’est pas un cadeau automatique (le sacrifice expiatoire !), c’est un choix, un chemin ardu, personnel, indépendant, long, comme celui de la plante qui se dirige vers toujours plus de lumière. L’homme « peut » le choisir, mais en toute liberté, il « peut » aussi le refuser. Dieu le Père n’a rien donné du tout, sauf son Esprit, qui indique le chemin possible vers lui pour ceux qui ont la foi. Mais alors…le mérite ? C’est parce que l’on a la foi que l’on s’engage dans ce chemin, au bout duquel il y a un Juge, et aussi un Père qui aidera le croyant tout au long du chemin, s’il est fidèle jusqu’au bout, qui le regénèrera.

 

Le Fils unique[1] : Pour une unitarienne Jésus est créé, non engendré, comme ses frères. Il n’est unique que par sa valeur qui le place bien au-dessus de ses frères.

 

Le « devenir enfants de Dieu » est plus juste à mon sens que  « être faits enfants de Dieu » :

 

Comme nous venons de le voir, pour le croyant, parcourir le chemin, avec fidélité, se fait dans le temps ; Jésus, dans les Evangiles, a pris progressivement conscience de son envergure ; le croyant « devient progressivement enfant de Dieu » ; ce n’est pas par « un coup de baguette magique » ( par un meurtre, non voulu par Jésus-Christ à aucun moment de son séjour à Jérusalem avant sa crucifixion, même s’il a pris "le grand risque",  par amour pour sa création, d’aller la présenter à Jérusalem, la ville sainte juive ) que le croyant est sauvé.

 

L’amour de Dieu : Psaumes 27. 10 ;Esaïe 49. 15 ;  63. 16 ; II Timothée 2. 13 ; Mt 7. 11

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



[1] J’ai longuement débattu de cette question, pp 74 à 84, dans mon « Etude des Evangiles », L’Harmattan 2006, Paris, collection « chrétiens autrement ».

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